Texte de Guy Berger sur le voyage 2016 de l'Association des Amis de la Maison Chateaubriand

 

 

CHATEAUBRIAND DE BOLOGNE A VERONE

 

 

Le voyage organisé par l’Association des Amis de la Maison de Chateaubriand nous a conduit du dimanche 8 mai au samedi 14 mai 2016 à Bologne, Ferrare, Vérone et Vicence. L’hôte de la Vallée-aux-Loups a visité ces quatre villes de l’Italie du Nord au cours de sa vie  dans des circonstances que je voudrais vous rappeler. Je vous indiquerai et vous citerai, ce faisant, les œuvres où l’on peut retrouver le souvenir de ces visites.

BOLOGNE.

Chateaubriand a traversé rapidement Bologne une première fois en 1803 lorsqu’il se rendit à Rome après avoir été nommé secrétaire de légation à l’ambassade de France auprès du Saint-Siège. Il n’a laissé de souvenir de cette première visite ni dans ses Mémoires, ni dans le Voyage en Italie, ni même dans sa Correspondance. Nous ne la connaissons que parce qu’il l’évoque de façon fugitive à l’occasion de sa seconde visite. La Correspondance nous permet toutefois de situer ce passage par Bologne autour du 25 juin car nous avons une lettre du 23 juin où il annonce son départ imminent de Milan et une autre du 27 juin où il fait part de son arrivée à Rome.

Chateaubriand est resté, en revanche, deux jours, peut-être même trois, à Bologne, en septembre-octobre 1828, lorsqu’il s’est rendu à Rome, capitale des Etats du Saint-Siège, où il avait été nommé ambassadeur du roi de France, pour remplacer le duc de Laval.

Nous pouvons suivre son voyage depuis Paris par sa Correspondance et par un « Journal de route » inséré dans les Mémoires d’outre-tombe[1]. Curieusement, mais Chateaubriand est coutumier du fait, les dates ne coïncident pas tout à fait entre ces deux types de document : Nous savons ainsi, de façon sûre, par de nombreuses lettres, qu’il est parti de Paris le dimanche 14 septembre alors qu’il écrit dans ce « journal de route » composé après l’événement : « J’ai quitté Paris le 16 septembre ». Mais l’itinéraire retracé ensuite dans le journal est bien celui pour lequel nous avons d’autres témoins : Chateaubriand est passé par Fontainebleau, Villeneuve-sur-Yonne, Lausanne, Le Simplon, Milan, Parme, Bologne, puis Ravenne, Rimini, Lorette, Terni et Rome enfin. Le « journal de route » donne comme date du séjour à Bologne le 28 septembre. Plusieurs lettres révèlent que le 28 et le 29 septembre, il était encore à Milan. Son arrivée à Bologne peut donc être datée, au plus tôt, du 30 septembre, voire du 1er octobre.

Bologne était la grande ville du nord des Etats pontificaux, la ville la plus riche aussi de ces Etats, la première enfin que l’on devait traverser lorsque l’on venait de la vallée du Pô. Le nonce à Paris avait prévenu le cardinal Albani, qui était le légat du Pape à Bologne, de la venue prochaine du nouvel ambassadeur du roi de France. Le cardinal Albani avait donné des instructions pour que Chateaubriand soit bien reçu à son arrivée dans les Etats pontificaux et que sa route vers Rome soit facilitée. Dans les Mémoires d’outre-tombe, celui-ci écrit donc : « Bologne me semble moins désert qu’à mon premier voyage. J’y ai été reçu avec les honneurs dont on assomme les ambassadeurs. J’ai visité un beau cimetière : Je n’oublie jamais les morts, c’est notre famille. Je n’avais jamais si bien admiré les Carrache qu’à la nouvelle galerie de Bologne. J’ai cru voir la Sainte Cécile de Raphaël pour la première fois tant elle était plus divine qu’au Louvre, sous notre  ciel barbouillé de suie »[2]. Dans les paragraphes suivants Chateaubriand évoque la campagne environnante : « Dans la Romagne, pays que je ne connaissais pas, une multitude de villes, avec leurs maisons enduites d’une chaux de marbre, sont perchées sur le haut de diverses petites montagnes comme des compagnies de pigeons blancs. Chacune de ces villes offre quelques chefs-d’œuvre des arts modernes ou quelques monuments de l’Antiquité. Ce  canton de l’Italie renferme toute l’histoire romaine : il faudrait le parcourir Tite-Live, Tacite et Suétone à la main ». Bien qu’il se soit dit dans ses Mémoires « assommé » par les honneurs avec lesquels on le recevait, Chateaubriand avait été en vérité flatté de cet accueil, tant pour lui que pour la fonction qu’il remplissait. Dans une lettre de Rome adressée à Madame Récamier le 11 octobre 1828, il écrira : « J’ai été très noblement accueilli par toutes les autorités sur la route, à Bologne, à Ancône, à Lorette. On savait bien que je n’étais pas tout à fait un homme comme un autre, mais on ne sait pas trop pourquoi ». Il ne cessera de penser que son rang de grand écrivain lui conférait un statut particulier.   

FERRARE.

            Chateaubriand s’est rendu à Ferrare, venant de Venise, le 18 septembre 1833, lors du deuxième voyage qu’il fit à Prague cette année-là, sur la demande très insistante de la duchesse de Berry. Celle-ci, qui s’était réfugiée à Naples, sa ville natale, lui avait donné rendez-vous à Venise. Elle souhaitait elle-même se rendre à Prague, où résidait Charles X exilé avec sa famille, afin de retrouver ses deux enfants : le duc de Bordeaux et la princesse Louise.

            Quittant Paris le 3 septembre 1833, « prenant la route du Simplon par Pontarlier », Chateaubriand était arrivé à Venise le 10 septembre. La duchesse de Berry n’y était pas encore et son chevalier servant avait passé une petite semaine à visiter la ville des Doges et à fréquenter les salons de l’aristocratie vénitienne. Le souvenir des séjours de Jean-Jacques Rousseau, de Silvio Pellico et surtout de Lord Byron lui avait servi de guide. Le mardi 17 septembre, il s’était fait conduire au Lido pour voir la mer et se promener sur la plage. Revenant à Venise, il apprit alors de la princesse de Bauffremont que la duchesse de Berry lui demandait de la rejoindre à Ferrare. Il partit immédiatement, prenant la route qui passait par Padoue et Rovigo. Il traversa le Pô de nuit sur un bac. « Un froissement sur l’eau, à travers le brouillard et l’ombre, annonça le bac ; il glissait le long de la cordelle soutenue sur des bateaux à l’ancre. Entre les quatre et cinq heures du matin, j’arrivai le 18 à Ferrare ; je descendis à l’hôtel des Trois Couronnes : Madame y était attendue » écrira-t-il dans les Mémoires d’outre-tombe. En attendant la princesse, il visita la cathédrale et l’hospice où Le Tasse, l’auteur de La Jérusalem délivrée, avait été enfermé en compagnie des fous. Le Tasse était depuis longtemps un de ses auteurs préférés, un de ceux aussi que Madame Récamier aimait et admirait.

Lorsque la duchesse de Berry fut rendue, elle  lui demanda de l’accompagner à Prague, puis, lorsqu’elle sut que les autorités autrichiennes ne la laisseraient pas passer en Autriche, de porter une lettre à Charles X dans la capitale de la Bohème. Chateaubriand d’abord très réticent à l’idée de retourner dans une ville qu’il avait quittée quatre mois plus tôt se laissa finalement convaincre : Comme il dira dans les Mémoires d’outre-tombe : « J’avais cent choses à voir à Ferrare, des palais, des tableaux, des manuscrits, il fallut me contenter de la prison du Tasse » [3]. Il passa le lendemain à Padoue pour faire viser son passeport et partit, le 20 septembre, vers le Nord. Il sera rendu à Prague le 26 septembre, après un voyage qui lui réservera quelques belles surprises, comme la fête de Saint Rupert à Salzbourg.

            L’édition de la Correspondance générale de Chateaubriand contient deux lettres écrites et postées à Ferrare « le mercredi 18 septembre 1833 », l’une est adressée à Madame de Chateaubriand, l’autre à Madame Récamier. Elles ne font que donner des informations sur le déroulement de ce voyage riche en rebondissements. Elles nous permettent simplement d’en préciser les étapes et le calendrier[4].

Les Mémoires d’outre-tombe nous donnent, en revanche, un petit tableau de Ferrare pris sur le vif, qui mérite d’être cité. On y notera les nombreuses allusions politiques : « Son Altesse royale n’étant point arrivée, je visitai l’église de Saint Paul ; je n’y ai vu que des tombes ; du reste, pas une âme, hormis celles de quelques morts et la mienne qui ne vit guère. Au fond du chœur pendait un tableau du Guerchin. La cathédrale est trompeuse : vous apercevez un front et des flancs où s’incrustent des bas-reliefs à sujets sacrés et profanes. Sur cet extérieur règnent encore d’autres ornements placés d’ordinaire à l’intérieur des édifices gothiques, comme rudentures, modillons arabes, soffites à nimbe, galeries à colonnettes, à ogives, à trèfles, ménagées dans l’épaisseur des murs. Vous entrez et vous restez ébahi à la vue d’une église neuve à voutes sphériques, à piliers massifs. Quelque chose de ces disparates existe en France au physique et au moral : dans nos vieux châteaux on pratique des cabinets modernes, force nids à rats, alcôves et garde-robes. Pénétrez dans l’âme d’un bon nombre de ces hommes armoriés de noms historiques, qu’y trouvez-vous ? des inclinations d’antichambre. Je fus tout penaud à l’aspect de cette cathédrale : elle semblait avoir été retournée comme une robe mise à l’envers : bourgeoise du temps de Louis XV, masquée en châtelaine du XII° siècle. Ferrare, jadis tant agitée de ses femmes, de ses plaisirs et de ses poètes, est presque déshabitée : là où les rues sont larges, elles sont désertes, et les moutons y pourraient paître. Les maisons délabrées ne se ravivent pas, ainsi qu’à Venise, par l’architecture, les vaisseaux, la mer et la gaieté native du lieu. A la porte de la Romagne si malheureuse, Ferrare sous le joug d’une garnison d’Autrichiens, a du visage d’un persécuté : elle semble porter le deuil éternel du Tasse ; prête à tomber, elle se courbe comme une vieille. Pour seul monument du jour sort à moitié de terre un tribunal criminel, avec des prisons non achevées. Qui mettra-t-on dans ces cachots récents ? la jeune Italie. Ces geôles neuves surmontées de grues et bordées d’échafaudages, comme les palais de la ville de Didon, touchent à l’ancien cachot du chantre de la Jérusalem »[5]. 

Ferrare était, en effet, pour Chateaubriand avant tout une ville où Le Tasse avait vécu et souffert. Aussi insérera-t-il dans les Mémoires d’outre-tombe, après cette évocation de la cité,  un assez long chapitre intitulé Le Tasse[6].  Il avait déjà traité de cet écrivain dans le Génie du christianisme, exprimant alors son admiration pour l’épopée chrétienne qu’était la Jérusalem délivrée mais formulant aussi certaines  réserves sur le style de l’œuvre. Le texte des Mémoires traite surtout de l’existence du poète italien, donnant de celui-ci une image romantique assez voisine de celle que l’on peut trouver chez Goethe ou chez Byron, deux auteurs que Chateaubriand cite[7]. Les deux premières phrases de ce chapitre donnent le ton : « S’il est une vie qui  doive faire désespérer du bonheur pour les hommes de talent, c’est celle du Tasse. Le beau ciel que ses yeux regardaient en s’ouvrant au jour fut un ciel trompeur »[8]. Il faut aussi citer la conclusion : « Les bâtiments dans lesquels s’enclôt aujourd’hui la prison du Tasse dépendent d’un hôpital ouvert à toutes les infirmités ; on les a mises sous la protection des saints : Sancto Torquato sacrum. A quelque distance de la loge bénie est une cour délabrée ; au milieu de cette cour, le concierge cultive un parterre environné d’une haie de mauves ; la palissade, d’un vert tendre, était chargée de larges et belles fleurs. J’ai cueilli une de ces roses de la couleur du deuil des rois, et qui me semblait croître au pied d’un Calvaire. Le génie est un Christ ; méconnu, persécuté, battu de verges, couronné d’épines, mis en croix pour et par les hommes, il meurt en leur laissant la lumière et ressuscite adoré ».

Précisons que Le Tasse n’a pas été le seul écrivain qui rendit Ferrare célèbre. C’est pour la cour des ducs d’Este, les souverains de Ferrare jusqu’à la fin du XVI° siècle, que furent, en effet, écrits les premières comédies et tragédies italiennes modernes mais, aussi et surtout, des poèmes chevaleresques où s’exprimèrent aux XV° et XVI° siècles la nostalgie pour les valeurs héroïques du monde féodal, le gout de l’aventure romanesque, le sens du merveilleux de toute une société aristocratique. Trois écrivains doivent être cités : Matteo Maria Boiardo (1440-1494), auteur du Roland amoureux (1494), Ludovico Ariosto (1474-1534), auteur du Roland furieux (1516-1532) et de la comédie Lena (1523), Torquato Tasso (1544-1595), auteur de la Jérusalem délivrée (1581)[9], de la tragédie Le Roi Thorismond (1587) et d’une pastorale poétique, L’Amyntas (1573), toutes œuvres qui marquèrent leur époque et qui  eurent une influence durable en Italie et dans toute l’Europe : la reine Elisabeth d’Angleterre se flattait de savoir par cœur plusieurs stances de la Jérusalem délivrée.

La Jérusalem délivrée fut un livre lu et apprécié par un vaste public en France dans la deuxième moitié du XVIII° siècle et dans la première moitié du XIX° siècle. Traduite en français dès 1595, elle fera alors l’objet de nombreuses traductions nouvelles. La traduction de Jean-Baptiste de Mirabaud sera rééditée à 20 reprises entre 1724 et 1866, celle de Lebrun sera republiée 24 fois entre 1774 et 1876. On peut compter pas moins de quinze autres traductions de 1785 à 1846, certaines connaissant plusieurs rééditions, telle celle en vers français du poète toulousain Louis-Pierre-Marie-François Baour-Lormian (1770-1854) qui, apparue en 1796 (an IV), sera rééditée en 1819 et en 1822[10]. L’opéra de Lulli, Armide, sur un livret de Quinault, s’inspirant directement du Chant XIV de la Jérusalem délivrée, avait connu un triomphe en 1686 et pendant plusieurs décennies. La musique de Lulli étant passée de mode, le livret de Quinault sera repris par Gluck en 1777 pour connaître un nouveau et durable succès [11]. Le Tasse sera peint, à l’époque romantique, par les poètes et les musiciens comme l’exemple du grand écrivain victime de l’incompréhension du public, guetté par le désespoir et la folie. Giacomo Leopardi écrira ainsi un Dialogue du Tasse et de son démon familier publié en 1824 dans ses Petites œuvres morales [12]. Donizetti composera un opéra Torquato Tasso en 1833. Delacroix exposera un tableau Le Tasse en prison sur lequel Baudelaire composera en 1842 un sonnet célèbre[13] :

Le poète au cachot, débraillé, maladif,

Roulant un manuscrit sous son pied convulsif,

Mesure d’un regard que la terreur enflamme

L’escalier de vertige où s’abime son âme…

Ce rêveur que l’horreur de son logis réveille,

Voila bien ton emblème, Âme aux songes obscurs,

Que le Réel étouffe entre ses quatre murs !

Plus près de nous, Ferrare a été le cadre des romans et nouvelles de Giorgio Bassani. Né le 4 mars 1916 à  Bologne, mort à Rome le 13 avril 2000, ce poète et romancier, actif au cinéma et à la télévision, fut aussi directeur des Editions Feltrinelli. Il y fut ainsi l’éditeur en 1958 du Guépard de Giuseppe Tomasi di Lampedusa[14]. Appartenant à une famille juive, installée à Ferrare depuis plusieurs siècles, il eut à souffrir des mesures de discrimination raciale à partir de 1938. Plusieurs membres de sa famille périront en déportation. Il évoqua dans son œuvre en prose la vie provinciale de la bourgeoisie juive sous le fascisme, la montée des menaces, la douloureuse marginalisation sociale et affective des victimes des persécutions. Cinq histoires de Ferrare datent de 1956. Le Jardin des Finzi-Contini, paru en 1962, est son roman le plus connu. C’est un livre émouvant, admirablement écrit et composé. Vittorio de Sica le portera à l’écran en 1970. En1980, Giorgio Bassani réunira les œuvres sur la ville où il avait passé son enfance et son adolescence dans un recueil intitulé Le Roman de Ferrare. Son œuvre a été assez tôt traduite en français et éditée chez Gallimard. Le Roman de Ferrare a fait notamment l’objet d’un volume dans la collection Quarto en 2006.                                                                                                                                                                                                                   

VERONE

            Chateaubriand est venu à Vérone  une première fois en juillet 1806 lorsqu’il se rendit d’abord à  Venise, puis à Trieste, afin de prendre un bateau pour aller en Grèce et commencer son voyage en Orient. Nous n’avons aucun témoignage contemporain de ce passage rapide par la ville de Roméo et Juliette. Ce n’est qu’en 1838 qu’il le rappela dans le Congrès de Vérone par une très brève phrase qu’il mentionnera à nouveau dans les Mémoires d’outre-tombe : « Nous avions déjà vu Vérone »[15].

Il y revint à la fin de 1822 pour participer à un Congrès de la Sainte-Alliance qui devait se réunir dans cette ville qui était alors, comme toute la Vénétie, une possession autrichienne. La réunion d’un nouveau Congrès, en application des dispositions de l’article 6 du Traité de Vienne, avait été décidée à Laybach en janvier 1821 [16]. L’objet initial était d’apprécier l’évolution de la situation politique en Italie. En juillet 1822, Metternich avait fait accepter que cette réunion se tienne à Vérone, dans un territoire contrôlé par l’Autriche. Chateaubriand était depuis le mois d’avril 1822 ambassadeur à Londres. Le 27 août il avait été désigné comme plénipotentiaire au Congrès. Il devait cette désignation à ses interventions pressantes, relayées par Madame de Duras, auprès de Villèle, principal ministre, leader du parti royaliste, et de Mathieu de Montmorency, ministre des affaires étrangères [17]. L’objet du Congrès avait, d’ailleurs, évolué. Il s’agissait désormais surtout de débattre d’une éventuelle intervention des Puissances en Espagne, où la situation n’avait cessé de se détériorer, depuis mars 1820, au détriment du roi Ferdinand VII. Villèle, très réticent à l’idée d’une participation de la France à une campagne militaire, comptait sur Chateaubriand, bien au courant des réserves anglaises, pour freiner les ardeurs interventionnistes de Mathieu de Montmorency. Ce dernier partit pour Vienne le 30 août, accompagné de plusieurs fonctionnaires du ministère, afin de participer aux conférences préliminaires au Congrès. Chateaubriand qui avait, de Londres, protesté de sa fidélité et de son amitié à Villèle, lui faisant comprendre qu’il partageait toutes ses vues, fut de retour à Paris le 12 septembre[18]. Il avait été reçu en audience par le roi Georges IV le 6 septembre. Il partit pour Vérone le 5 octobre au soir. Il avait envoyé en éclaireur le comte de Boissy, attaché à son ambassade de Londres, retenir une résidence à Vérone. Ce fut la Casa Lorenzi, via San Nicolo. 

            La correspondance de Chateaubriand nous permet de suivre son itinéraire : il est à Dijon le 7 octobre au matin, à Genève le 8 octobre au soir, d’où il écrit à Villèle un bref mot : « Tout à vous de cœur et de politique ». Il est à Milan le 12 octobre au matin, d’où il envoie une lettre à Madame de Duras pour la prévenir qu’il a vu le Simplon et les îles Borromées, « l’enfer et le ciel… les arbres qui ont toutes leurs feuilles, cette belle lumière, ce beau soleil, m’ont fait souvenir du temps où l’Italie était quelque chose pour moi ». Il arrive le 14 octobre à Vérone où il retrouve ses collaborateurs de Londres : le vicomte de Brézé, le comte de Boissy, le comte d’Aspremont et Henri-Louis de Chastellux, duc de Rauzan, gendre de Madame de Duras, qui sera directeur des affaires politiques, lorsque Chateaubriand deviendra ministre des affaires étrangères.

            Mathieu de Montmorency arriva le lendemain, 15 octobre, venant de Venise. La délégation française à ce congrès, qui marquait pleinement la rentrée de la France dans la grande politique européenne, était nombreuse : outre le ministre et ses collaborateurs du département, elle comprenait avec rang de plénipotentiaires les ambassadeurs de France à Vienne (le marquis de Caraman), à Saint-Pétersbourg (le comte de La Ferronnays) et à Londres (le vicomte de Chateaubriand). Etaient également présents à Vérone le comte de Serre, ambassadeur à Naples, et le marquis de la Maisonfort, ministre à Florence. Toutes ces personnes avec leurs domestiques étaient logées dans pas moins de six palais. Les délégations étrangères comprenaient le duc de Wellington, le prince de Metternich, Friedrich von Gentz, principal conseiller de Metternich, Pozzo di Borgo, ambassadeur du tsar à Paris, le comte de Bernstorff, ministre des affaires étrangères de Prusse, le comte de Nesselrode, ministre des affaires étrangères de Russie. Le tsar de Russie, Alexandre 1er, l’empereur d’Autriche, le roi de Naples, le roi de Piémont-Sardaigne étaient, enfin, personnellement présents.

            Chateaubriand a narré, de son point de vue, le déroulement de ce congrès diplomatique dans un livre publié en 1838 et intitulé Le Congrès de Vérone. Ce livre est à la fois un ouvrage d’histoire et de réflexion politique et un morceau anticipé de ses Mémoires. Il y renverra, lorsqu’il arrivera à ce moment de son existence, dans les Mémoires d’outre-tombe. Ce livre remarquable, digne des plus grands de cet écrivain, a été longtemps un peu négligé. Mais il a fait l’objet, en 2014, d’une édition critique, dans la nouvelle collection des Œuvres complètes chez Champion. Cette édition est due à Jacques-Alain de Sédouy, vice-président de la Société Chateaubriand, ancien ambassadeur. Son introduction permet de replacer ce livre dans son contexte historique et de « décrypter » le récit de Chateaubriand. Le congrès de Vérone avait déjà été analysé dans tous ses détails par Jacques-Alain de Sédouy dans un livre de 2009 : Le Concert Européen[19]. Le sujet étant assez complexe, comme toutes les questions de politique internationale qui mettent en jeu des intérêts divers, je ne peux guère que renvoyer à ces deux ouvrages dans cette brève note de présentation des voyages de Chateaubriand dans cette partie de l’Italie.

La Correspondance générale de Chateaubriand et le Congrès de Vérone contiennent peu de notations sur les lieux où se déroula le congrès. Chateaubriand n’était pas à Vérone pour faire du tourisme. S’il multiplia tout de suite habilement les contacts avec les responsables politiques présents à Vérone[20], il resta, comme les autres plénipotentiaires français, un peu à l’écart des négociations décisives tant que Mathieu de Montmorency fut présent. Mais après le retour de ce dernier à Paris, le 22 novembre, il devint, sur la proposition de La Ferronays, le principal animateur de la délégation française prenant personnellement en charge les discussions sur la traite des Noirs et les colonies espagnoles qui étaient à l’ordre du jour. Il avait sur ses collègues la supériorité d’être un dirigeant politique par rapport à de hauts fonctionnaires, professionnels de la diplomatie. Il put néanmoins se rendre à Mantoue pour voir le lieu où Virgile était né. Il accepta aussi, après l’avoir décliné une première fois, une invitation à Parme de Marie-Louise : « Nous la trouvâmes fort gaie : l’univers s’étant chargée de se souvenir de Napoléon, elle n’avait plus la peine d’y songer… Il n’y avait là de singulier que nous, dînant auprès de Marie-Louise, et les bracelets faits de la pierre du sarcophage de Juliette, que portait la veuve de Napoléon »[21] Le congrès avait attiré à Vérone des artistes, chanteurs et comédiens et … des journalistes anglais. Chateaubriand mentionne la  représentation d’un opéra de Paisiello qui fut donnée dans les arènes illuminées et dont il semble avoir gardé un vif souvenir. Les réjouissances liées à la présence de ces nombreuses personnalités se terminèrent par une course de chevaux. Dans le Congrès de Vérone, Chateaubriand précise qu’il ne manqua pas de voir les principaux monuments de la ville et les lieux rendus dignes d’intérêt par une histoire récente[22] : « Nous avions déjà vu Vérone ; nous nous présentâmes de nouveau à ses antiquités et au casino Gazola, retraite de ce Louis XVIII que nous avions maintenant l’honneur de représenter à l’assemblée des rois [23]. Nous visitâmes le palais Canossa et le monument de Can grande : ce Can grande avait été l’hôte de Dante, homme très illustre, dit l’historien de Reggio, et qui charmait le seigneur de la Scale par son génie »[24].

Chateaubriand quitta Vérone, le jour de la clôture du Congrès, le 13 décembre 1822, pour revenir en France le plus rapidement possible. Il sera à Paris le 19 décembre. La veille de son départ, le 12 décembre, il écrit à Madame de Duras une lettre significative, révélatrice de ses ambitions au terme de ces deux mois passés à Vérone : «  Je pars subitement après une longue conversation avec le prince Metternich et une autre avec l’empereur Alexandre. Le premier désire que je me rende à Paris pour rendre compte de ce que je sais. Je crois entrevoir une nouvelle route. Je l’indique aujourd’hui à Villèle par un mot en réponse à deux de ses lettres que j’ai reçues à la fois. Ce serait une singulière destinée si j’avais arrangé dans 24 heures des choses dont on a essayé pendant deux mois de m’empêcher de me mêler. L’empereur m’a demandé de lui écrire, je tâcherai de faire le contrepoids aux correspondances par lesquelles on abuse du plus noble et généreux caractère qui soit au monde. Vous voyez ce que j’ai gagné quand j’ai été laissé à mes propres forces. Voyez Villèle et ne dites qu’à lui où j’en suis avec l’empereur de Russie »[25]. Le même jour il écrit aussi à Madame Récamier dont il connait l’amitié pour Mathieu de Montmorency : « Je vais enfin vous revoir ! … J’ai bien des choses à vous dire et je ne suis pas aussi content que vous de votre ami »[26]. La suite des événements est connue. Le 25 décembre eut lieu un conseil des ministres à l’issue duquel le roi donna raison à Villèle et Mathieu de Montmorency se jugeant désavoué démissionna. Le 28 décembre Chateaubriand était nommé ministre des Affaires étrangères.

Il aura l’occasion de revenir à Vérone en 1833 lors de son deuxième voyage à Prague, en se rendant à Venise où il devait en principe rencontrer la duchesse de Berry (voir ci-dessus). Ce passage à Vérone que l’on peut dater du 9 septembre 1833, la veille de son arrivée à Venise, suscitera dans le Congrès de Vérone une page qui sera reprise dans les Mémoires d’outre-tombe : « Cette  ville si animée par la présence des souverains de l’Europe en 1822 était retournée au silence. Le congrès était aussi passé dans ses rues solitaires, que la cour des Scaligieri et le sénat des Romains. Les Arènes dont les gradins s’étaient offerts à mes regards, chargés de cent mille spectateurs, béaient désertes ; les édifices que j’avais admirés sous l’illumination brodée à leur architecture, s’enveloppaient, gris et nus, dans une atmosphère de pluie ». Chateaubriand rappellera ensuite les noms de tous ceux qu’il avait vus à Vérone, onze ans auparavant, et qui étaient morts depuis : l’empereur de Russie Alexandre, l’empereur d’Autriche François, le roi de Sardaigne Charles-Félix, Mathieu de Montmorency, M.de Bernstoff, F. von Gentz, M. de la Maisonfort, la comtesse Tolstoï, … et ce rappel provoquera l’une de ces méditations qui scandent son œuvre : « Si tant d’hommes couchés avec moi sur le registre du Congrès se sont fait inscrire à l’Obituaire ; si des peuples et des dynasties royales ont péri ; si la Pologne a succombé[27] ; si l’Espagne est de nouveau anéantie [28] ; si je suis allé à Prague m’enquérant des restes fugitifs de la grande race dont j’étais le représentant à Vérone, qu’est-ce donc que les choses de la terre ! Prestige du génie ! Personne ne se souvient des discours que nous tenions autour de la table du prince de Metternich : aucun voyageur n’entendra jamais chanter l’alouette dans les champs de Vérone sans se rappeler Shakespeare [29]. Chacun de nous, en fouillant à diverses profondeurs dans sa mémoire, retrouve une autre couche de morts, d’autres sentiments éteints, d’autres chimères sans vie, qu’inutilement il allaita, comme celles d’Herculanum, à la mamelle de l’Espérance »[30].

VICENCE

            C’est par une très brève mention dans les Mémoires d’outre-tombe que nous savons que Chateaubriand est passé par Vicence les deux fois où il se rendit à Venise : en juillet1806 et en septembre 1833, et sans doute également en 1845. Relatant son voyage de 1833, il note, en effet : « Je rétrogradais de vingt sept années car je n’avais pas fait la route de Vérone à Venise depuis 1806. A Brescia, à Vicence, à Padoue, je traversai les murailles de Palladio, de Scamozzi, de Franceschini, de Nicolas de Pise, de Frère Jean » [31]. Pour lui, comme pour nous, Vicence était la ville de Palladio, le grand architecte de la Renaissance.

 

                                                                                                         Guy Berger

 

SUR LE TASSE

La vie du Tasse est bien retracée dans les deux introductions des deux récentes traductions de La Jérusalem délivrée, celle de Jean-Michel Gardair et celle de Michel Orcel. Pierre Milza résume bien le sujet dans son Histoire de l’Italie, des origines à nos jours (Paris, Fayard, 2005, pp. 521-522) :

« Le Tasse est né à Sorrente, dans le royaume de Naples en 1544. Sa vie et son œuvre incarnent assez bien  l’angoisse et les contradictions de cette génération d’intellectuels italiens qui ont vécu et travaillé dans le climat de la Contre-Réforme. Fils de la Renaissance, encore imprégnés de son vitalisme, de son appétit des nourritures terrestres, de son néo-paganisme, ils ont dû bon an mal an se soumettre aux préceptes austères élaborés par les pères conciliaires. Certains d’entre eux le feront sans états d’âme, en dissimulant leur vraie nature et leurs sentiments intimes derrière un opportunisme prudent : à la manière d’un Torquato Accetto, auteur en 1641 d’un traité intitulé Della dissimulazione onesta. D’autres devront, comme Le Tasse, lutter toute leur vie contre eux-mêmes, hantés par la peur de ne pas écrire en accord avec l’enseignement de l’Eglise.

La jeunesse de Torquato Tasso fut, très classiquement, celle d’un jeune courtisan, rompu aux humanités classiques – il a étudié à Urbino, Venise, Padoue et Bologne – et entré au service de la cour des Este de Ferrare. Il y connut comme poète un très vif succès avec un Rinaldo en douze chants, publié en 1562 et admiré dans toute l’Italie, puis avec Aminta, un drame pastoral qui fut représenté dans la villa du Belvédère en juillet 1573. Deux ans plus tard, Tasso avait achevé l’œuvre qui devait lui assurer une immense notoriété posthume et achever de détraquer cet esprit inquiet, déchiré par la culpabilité et soucieux de se conformer aux dogmes et aux préceptes moraux fixés par le concile. La Gerusalemme liberata relate l’histoire du siège et de la prise de Jérusalem par les croisés commandés par Godefroy de Bouillon. Il s’agit donc d’un poème épique, mais dans lequel le Tasse a inséré de nombreux épisodes lyriques (Tancrède et Clorinde, Renaud et Armide, etc.) où transparaissent la sensualité et la vive imagination du poète.

A peine avait-il mis la dernière main à son poème que Le Tasse, désormais rongé par le doute et la folie de la persécution, voulut soumettre la Jérusalem délivrée à une sorte de tribunal composé d’ecclésiastiques chargés d’en vérifier la stricte conformité avec la doctrine de l’Eglise et avec les préceptes moraux édictés par celle-ci. Les censeurs ainsi sollicités ne se privèrent pas de tailler dans le vif, supprimant les épisodes romanesques, corrigeant les passages jugés « libertins » et obligeant finalement l’auteur à défendre pied à pied les personnages auxquels il avait donné vie. Combat épuisant, contre les autres et contre lui-même, qui acheva de briser l’équilibre mental du poète. Ses extravagances, ses fugues, ses violences finirent par contraindre les autorités de Ferrare à le faire enfermer à l’asile de Sant’Anna, où il resta sept ans, composant durant ce séjour en enfer des pièces lyriques et surtout des dialogues philosophiques d’une grande profondeur.

Libéré en 1586 sur les instances de Vincent de Gonzague, prince de Mantoue, Tasso mena durant les dernières années de sa vie une existence vagabonde à travers la Péninsule, composant plusieurs poèmes lyriques ainsi qu’une tragédie, Il Re Torrismondo (1587), et remaniant sa Gerusalemme liberata dont il désavoua l’édition qui en avait été faite durant son internement à Ferrare. Débarrassée de son caractère profane et rebaptisée Gerusalemme conquistata, l’épopée ainsi transformée en pièce édifiante fut publiée à Naples en 1593. Retiré au couvent de Sant’Onofrio, sur le Janicule, Torquato Tasso y mourut le 25 avril 1595. Poète baroque, le Tasse était encore, ne serait-ce que par son destin tragique un homme du Cinquecento ».

                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                    

 



[1] Les lettres se trouvent au tome VIII de la Correspondance Générale (Paris, Gallimard, 2010), le « Journal de route » au chapitre 2 du Livre XXIX des Mémoires d’outre-tombe (tome 2 de l’édition de Jean-Claude Berchet à la Pochothèque, qui est aujourd’hui l’édition de référence).

[2] Ce tableau de Sainte Cécile avait été cédé à la France par le traité de Tolentino le 19 février 1997et avait dû être restitué en 1815. Ce passage des Mémoires d’outre-tombe se trouve au tome 2, pp. 189-190.

[3] Mémoires d’outre-tombe, Livre XL, chapitres 1 et 4, tome 2, pp. 865 et 888.

[4] Correspondance générale, tome 9, Paris, Gallimard, 2015, pp. 276-277.

[5] Mémoires d’outre-tombe, Livre XL, chapitre 1, tome 2, pp. 865-866. L’allusion au palais de Didon fait référence à deux vers de l’Enéide de Virgile (chant IV, vers 88-89) : « Les travaux arrêtés demeurent en suspens, énormes murailles menaçantes, échafaudages qui montent vers le ciel » (pendent opera interrupta, minaeque murorum ingentes, aequataque machina caelo).

[6] Mémoires d’outre-tombe, Livre XL, chapitre 2, pp. 867-880.

[7] Goethe écrivit sa pièce Torquato Tasso en 1786-1788, lors de son voyage en Italie. Il l’acheva après son retour en Allemagne en 1790. Byron écrivit son poème The Lament of Tasso en 1817 en Italie. Ce poème sera publié à Londres en juillet 1817.

[8] Chateaubriand fait ici allusion au lieu de naissance du Tasse: Sorrente, un port situé sur la pointe sud du golf de Naples, en face de l’ile de Capri.

[9] 1581 est la date de la première édition intégrale de l’œuvre parue à Parme en février 1581. Mais Torquato Tasso avait fait circuler des copies manuscrites à partir de 1575 et une édition tronquée avait déjà été publiée à Venise en 1580 sous le titre de Goffredo (Godefroy). L’auteur était, depuis le 11 mars 1579, enfermé à Ferrare dans l’hospice de Sainte-Anne, avec les aliénés, « prison » dont il ne sortira qu’en 1586. Il ne voulut pas reconnaître son œuvre et travailla à la remanier profondément. Cette refonte aboutira à la publication en 1593 à Rome d’une Gerusalemme conquistata où beaucoup verront une trahison du chef d’œuvre initial. Chateaubriand écrit ainsi : « S’en prenant de ses maux à son poème immortel, il le refît et le gâta » (Mémoires d’outre-tombe, tome 2, p.874). 

[10] Il existe deux bonnes traductions récentes de La Jérusalem délivrée : l’une de Jean-Michel Gardair (édition bilingue, Paris, Garnier-Bordas, 1990), l’autre de Michel Orcel (sous le titre de Jérusalem libérée, Paris, Gallimard, Folio classique, 2002).

[11] La Jérusalem délivrée et le personnage d’Armide, la belle magicienne païenne tombée amoureuse d’un chevalier chrétien, inspireront des opéras à Scarlatti, Vivaldi, Haendel, Haydn, Cherubini, Rossini.

[12] Giacomo Leopardi, Petites œuvres morales, traduit de l’italien par Joël Gayraud, Paris, Editions Allia, 1993, pp.77-85.

[13] Baudelaire, Œuvres complètes, Pléiade, Claude Pichois éditeur, tome 1, Paris, Gallimard, 1975, p. 168.

[14] Le roman qui eut un succès mondial et fit la fortune de Feltrinelli avait été refusé par les maisons d’édition Mondadori et Einaudi.

[15]  Le Congrès de Vérone, édition de Jacques-Alain de Sédouy, dans la nouvelle collection des Œuvres complètes, Paris, Editions Champion, 2014, p. 160. Mémoires d’outre-tombe, La Pochothèque, tome 2, p.827.

[16] Lors du premier congrès, en octobre-novembre 1818, à Aix-la-Chapelle, la France, contre laquelle le système avait été monté en 1815, avait été introduite dans le concert européen aux cotés de l’Autriche, de la Russie, de la Prusse et de l’Angleterre.

[17] Villèle sera nommé, par le Roi, président du Conseil des ministres le 4 septembre 1822.

[18]  Le 2 octobre, il écrira à Madame de Duras : « Je trouverai mon confrère Mathieu prêt comme moi à exécuter les ordres que je  lui porterai du Président Villèle. Cela m’amuse assez ». Correspondance générale, tome 5, Paris, Gallimard, 1986, p. 294.

[19] Jacques-Alain de Sédouy, Le Concert européen. Aux origines de l’Europe (1814-1914), Paris, Fayard, 2009, 430 pages.

[20] Il écrit le 18  octobre à Madame de Duras: “J’ai diné hier chez le prince de Metternich. Je dois voir demain les empereurs et les rois ». Correspondance générale, tome 5, p. 300.

[21] Le Congrès de Vérone, p. 161.

[22] Le Congrès de Vérone, p.160.

[23] Louis XVIII était venu à Vérone, pendant son émigration, à la fin de l’année 1793, pour rencontrer le comte d’Antraigues, organisateur d’un réseau d’espionnage dans la France républicaine. Il y revint pour y séjourner, de mai 1794 à juillet 1796, dans une modeste maison, la Casa Gazola. Il en fut chassé par le gouvernement autrichien à la demande de la France.

[24] Le palais Canossa est le plus beau palais de Vérone, chef d’œuvre de l’architecte Sanmicheli. Can Grande della Scala, protecteur de Dante, vécut de 1291 à 1325. Il appartenait à la famille des seigneurs de Vérone aux XIII° et XIV° siècles.

[25] Correspondance générale, tome 5, pp. 342-343. Ces derniers entretiens sont relatés dans le Congrès de Vérone, pp.259-264.

[26] Ibidem, p. 343.

[27] La Pologne révoltée en novembre 1830, avait été écrasée en 1831 et absorbée dans la Russie en 1832.

[28] L’Espagne était déchirée par les guerres carlistes. Après la mort de Ferdinand VII, le 20 septembre 1833, sa veuve, la reine Marie-Christine de Bourbon-Sicile, soutenue par les libéraux, fit abolir la loi salique pour devenir régente pendant la minorité de sa fille Isabelle, âgée de trois ans, ce qui provoqua la révolte du frère de Ferdinand VII, don Carlos, soutenu par les conservateurs. Le gouvernement de la Monarchie de Juillet soutint la Régente.

[29] Allusion à un passage célèbre de Roméo et Juliette, la pièce de Shakespeare, qui se situe « in fair Verona ». A l’acte III, scène 5, une alouette réveille les amants au matin de leur nuit de noces : « Juliet: Wilt thou be gone? It is not yet near day: / It was the nightingale, and not the lark, / That pierced the fearful hollow of thine ear; / Nightly she sings on yon pomegranate tree: / Believe me, love, it was the nightingale. / Romeo: It was the lark, the herald of the morn / No nightingale : look, love, what envious streaks / Do lace the severing clouds in yonder east: / Night’s candles are burnt out, and jocund day / Stands tiptoe on the misty mountain tops”. 

[30] Le Congrès de Vérone, pp. 712-714.

[31] Mémoires d’outre-tombe, tome 2, p. 827.